Le sens du cœur, Sophie Mazzoli
Le cœur, un fabuleux organe considéré comme le berceau de notre existence, le protecteur de cette énergie qui nous anime. On le voyait comme le siège de nos émotions les plus profondes mais, alors même qu’il se met à cogner plus fort dans nos poitrines à la vue d’une personne sensationnelle, ces sentiments ressentis sont illusoires. C’est vrai qu’il nous fait en partie ressentir ce bouillonnement, mais il n’en est pas le responsable, il n’est qu’un robot, parfaitement réglé pour l’organisation décidée par notre chef, notre cerveau. Ce n’est qu’un effecteur, une pièce de puzzle de cette magnifique organisation physiologique, un élément somatique de la vie organique.
Seulement un élément constitutif de notre organisme ; le cœur fonctionne sans relâche pour irriguer notre organisme de sang. Il est programmé depuis notre naissance pour cette tâche unique : pomper sans arrêt ce liquide rouge pour alimenter nos organes en macromolécules et les purifier de leurs déchets. Il est parfaitement réglé pour cette fonction. Les rouages de cet engin tournent exactement à la bonne vitesse, et en excellente synergie. La pression de l’appareil est incontestablement régulée. La machine est assurément alimentée. Les protocoles sont strictement respectés. Le temps est scrupuleusement contrôlé, permettant à cet automate de fonctionner merveilleusement bien, sans presque jamais faillir à son exercice. Chaque individu est construit selon les mêmes plans et les mêmes programmes. Nous sommes tous nés comme des automates, avec comme simple but de vivre aussi longtemps que possible.
Pourtant, il est impossible que cet organe essentiel à notre vigueur soit exempt de toute cette ardeur si spéciale qui brûle en nous. Et si cette substance rouge était bien plus que nutritive ? N’apporte-elle pas la chaleur, l’énergie, l’animation, autrement dit la vie ?
La VIE, c’est ce qui fait la différence. Cette partie organique, physique, carbonée que nous possédons tous n’est qu’une monture. La vie est en nous, nous sentons cette force qui nous pousse dans une direction. Chaque individu cherche à son échelle un objectif, des repères, simplement la direction qu’il va suivre jusqu’au bout de sa vie : le sens de la vie. Comment pourrait-il y en avoir un si nous ne sommes qu’un système de machines fonctionnant selon des programmes inscrits dans nos gènes ?
Tous les automates ne peuvent pas accomplir la même tâche. Chaque automate effectue la tâche pour laquelle il a été conçu. Tous les individus ne sont pas animés des mêmes valeurs, ou capables des mêmes actions. Chaque individu agit pour la cause qui l’habite. Nous sommes tous nés comme des automates, mais ce sont nos actions qui font de nous des êtres vivants. Nous existons d’abord grâce à ce armature organique, mais nous existons surtout par nos choix et leurs impacts. Nous avons tous le même cœur organique ou robotique mais il ne bat pas pour les mêmes raisons pour chacun d’entre nous.
Sophie Mazzoli